Paul Rigouste
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Paul RigousteParticipant
@ caerbannog
Complètement d’accord avec tout ce que tu dis sur Imitation of Life (qui est aussi un de mes films préférés 🙂 ). Après le film est ambivalent sur pas mal de points je pense (que j’arrive pas tous à analyser, sûrement en partie parce que je connais pas assez bien le contexte politique des États-Unis à l’époque au niveau des rapports sociaux de « race »).
Là j’ai pas le temps de trop écrire (et j’aurais pas trop le temps pendant un mois, mais je reviendrai après parce que ton avis sur ce film m’intéresse beaucoup, tu as l’air de très bien le connaître). Juste un point qui me travaille sans que j’arrive trop à savoir quoi en penser : pourquoi avoir choisi de faire subir l’oppression raciste avant tout à un personnage blanc de peau (Sarah Jane) ? J’ai l’impression que c’est tordu (mais ça l’est peut-être pas…). Parce que du coup j’ai l’impression que l’oppression que subit Annie « passe par » Sarah Jane (au sens où elle meurt parce que son cœur est brisé de ne plus pouvoir voir sa fille). Alors c’est sûr qu’en dernier lieu c’est clair qu’elle meurt parce qu’elle est Noire (à la fois à cause de ce que subit sa fille mais aussi parce qu’elle s’est usée au travail pour les Blanc-he-s), mais je sais pas, ce dispositif me met un peu mal à l’aise en même temps. Pas toi ?
C’est comme ce dialogue que tu cites, où Annie fait prendre conscience à Lora qu’elle s’est jamais intéressée à elle, à ses ami-e-s, à sa vie. Ce moment est génial, mais en même temps on peut aussi se demander pourquoi le film ne nous l’a pas montrée non plus à nous (spectatrices/teurs) la vie d’Annie et ses ami-e-s. Si on est gentil avec le film, on peut peut-être voir ça comme une stratégie qui viserait à faire prendre conscience au public qu’il est en train de regarder un film où les Noir-e-s sont au final totalement invisibilisé-e-s quand illes ne sont pas dévoué-e-s aux Blanc-he-s. Et du coup la scène d’enterrement finale est d’autant plus émouvante que celleux qui avaient été totalement invisibilisé-e-s par le film y ressurgissent en tant que communauté. Mais en même temps, si on est un peu moins gentil, on peut si dire que c’est une ambivalence politique, voire une contradiction, vu que le film se désintéresse autant les Noir-e-s non-dévoué-e-s aux Blancs que Lora s’en désintéresse. Non ?
Je suppose de toute façon que l’ambivalence était de mise dans le contexte d’une production hollywoodienne de cette envergure (le film a quand même été 4ème au box-office de 1959). Mais après quand on compare ce film avec par exemple Le Majordome, lui aussi gros succès au box-office et film hautement ambivalent, je préfère quand même de loin l’ambivalence d’Imitation of Life, car il me semble que les éléments progressistes y sont plus nombreux que les éléments conservateurs/réactionnaires (alors que pour le majordome, c’est l’inverse à mon avis). Mais bon après ça c’est mon point de vue subjectif.
(sinon j’ai commencé à regarder la version de 1934 avec Claudette Colbert (http://en.wikipedia.org/wiki/Imitation_of_Life_%281934_film%29) , et c’est marrant de voir les différences, notamment sur la question du racisme. J’ai pas encore fini donc je peux pas développer, mais c’est intéressant à voir je trouve, car les choix de Sirk apparaissent du coup beaucoup plus clairement).
Paul RigousteParticipantOulala, je crois que je vais passer mon chemin alors. Merci pour le résumé !
Paul RigousteParticipantJe viens de découvrir une autre série où il y aurait apparemment des loups garous : Hemlock Grove (http://en.wikipedia.org/wiki/Hemlock_Grove_%28TV_series%29)
Est-ce que quelqu’un-e l’aurait vu par hasard et pourrait m’en dire plus ? (est-ce que ce sont des vrais loups garous ? est-ce que ce sont exclusivement des mâles? qui il-le-s déchiquettent ? est-ce que c’est masculiniste? etc.)Paul RigousteParticipantJ’ai regardé la chose car vous avez excité ma curiosité, et effectivement la scène en question est tristement fameuse :-/
Il serait intéressant d’avoir des données statistiques sur la fréquence de ce genre de scénario (ou de scènes) masculinistes. J’ai l’impression qu’on les trouve de plus en plus ces dernières années, mais je me demande si c’est qu’ils sont vraiment plus nombreux ou juste que je les remarque plus (maintenant que j’en ai conscience). En France je pense qu’il y a un regain du masculinisme dans les films ces dernières années (et notamment cette année : http://www.lecinemaestpolitique.fr/forums/topic/les-papas-et-leurs-fistons/), mais aux États-Unis je me demande (c’est sûr que c’est omniprésent, mais je me demande c’est ça s’aggrave ou pas). Il me semble qu’on croise beaucoup ce genre de thème dans les films d’actions j’ai l’impression (comme dans les Taken, White House Down, Die Hard 4, etc.).
Et cette scène de The Strain m’a aussi fait penser tout particulièrement à une scène du dessin animé sorti récemment « Mr Peabody et Sherman ». A un moment, on annonce à Mr Peabody qu’on va lui retirer la garde de Sherman, et celle qui veut lui retirer son fils est une espèce de femme effrayante et absolument immense, qui domine un pauvre petit homme tout rabougri et soumis. Bref, un sommet de masculinisme là aussi…
Paul RigousteParticipantMerci pour cette liste, y en a plein que j’ai pas vu, cool ! (après y en a que j’ai vu aussi et que j’ai du mal à qualifier de « féministe », mais bon 🙂 )
Sinon j’ai revu récemment un vieux film que j’adore : Imitation of Life, de Douglas Sirk (1959). C’est un film assez complexe je trouve, mais qui a une dimension féministe indéniable à mon avis (même si y a quelques micro trucs qui me posent question). Après, un truc qui m’intrigue beaucoup plus dans ce film, c’est la représentation des rapports de « race ». Y a une volonté antiraciste, c’est certain, et il y a plein de trucs très intéressants à ce niveau, mais en même temps je sens que y a aussi des trucs assez craignos, mais j’arrive pas bien à les analyser. Si jamais y a quelqu’un-e qui a vu ce film et qui a des idées dessus (notamment sur la représentation des rapports de « race »), ça m’intéresse bien d’en discuter.
20 juillet 2014 à 11 h 26 min en réponse à : Dragons 2, l'apologie du paternalisme bienveillant #9799Paul RigousteParticipantOui, complètement d’accord avec ton analyse de Dragons 2 !
En ce qui concerne le spécisme, je ne trouve pas qu’il soit latent, mais au contraire assez explicite et central. Je n’ai pas vu le film dans de très bonnes conditions, donc je ne me souviens pas bien de tous les détails, mais il m’a semblé que le 2 était peut-être encore plus agaçant que le 1 sur la question du spécisme. Déjà, le fonctionnement de l’île de Beurk qu’on nous montre au début est présenté comme un paradis pour les humain-e-s et les animaux. Or, c’est un monde où les dragons (au départ animaux sauvages) ont été domestiqués par les Vikings, auxquel-le-s ils servent de montures. Et en prime, les moutons servent de ballons pour les jeux Vikings, ce qui est censé être amusant (et que j’ai trouvé personnellement super glauque). Il me semble que tout le but pour le héros sera de sauver ce monde en le protégeant du méchant chasseur de dragon. Donc une alternative complètement pourrie entre exploitation n°1 et exploitation n°2 (avec bien sûr l’exploitation n°1 qui n’est pas présentée comme une exploitation mais comme un état d’harmonie, de coopération humains/animaux, etc). “Beurk” j’ai envie de dire 🙂
Et le pire je trouve, c’est que le film nous montre brièvement une troisième voie beaucoup plus intéressante pour automatiquement la disqualifier. Il s’agit de la voie défendue par la mère, qui protège les dragons dans ce qui m’évoque une sorte de réserve naturelle (après encore une fois mes souvenirs sont vagues, donc peut-être que je déforme ou oublie des choses). Or il me semble que cette idée de laisser les dragons vivre comme ils l’entendent n’est pas pris au sérieux par le film (peut-être parce qu’il s’agit d’une voie trop “idéaliste”, trop “féminine”, il faudrait que je revoie le film pour voir comment le film s’y prend exactement pour disqualifier cette idée), parce que la seule manière sérieuse de protéger les dragons, c’est d’en faire les animaux domestiques des humain-e-s comme le fait Harold. J’ai l’impression que l’idée d’une réserve naturelle (donc d’un lieu où les humaine-s laissent vivre les dragons en paix) est disqualifiée en même temps que le personnage de la mère est violemment exclue à la périphérie du film lorsque le père débarque. En ce sens, j’ai l’impression qu’il y a une articulation assez étroite dans le film entre spécisme et sexisme (surtout quand on pense à cette idée foireuse selon laquelle Harold va synthétiser les caractères de son père et sa mère : “un peu de virilité et un peu de féminité, c’est ça la solution”. Beurk. A mon avis, le film pense la question du rapport humain-e-s/animaux de la même manière : Harold comme juste milieu entre la position de son père et celle de sa mère)
Et pour ce que tu dis sur Kaguya, je ne sais pas du tout, car je n’y connais rien en mythologie. Je vais faire des recherches (j’aimerai bien écrire un truc dessus quand ça sortira en dvd). J’ai lu sinon que c’était inspiré d’un conte traditionnel japonais, dont il existe très probablement des tonnes de versions. J’aimerais bien savoir de quelle version Takahata s’est inspiré pour faire son film, et qu’est-ce qu’il a éventuellement modifié, ajouté, ou enlevé. Je vais faire des recherches, mais si tu tombes sur des trucs sur internet, n’hésite pas à me transmettre les liens si tu y penses, ça m’intéresse.
Et oui, c’est effectivement plutôt amer comme film, voire assez désespéré. Personnellement cette fin m’a vraiment bouleversé. Je ne développe pas pour ne pas spoiler celleux qui ne l’ont pas vu. Comme ça reste très poético-métaphorique, je pense qu’on peut l’interpréter de plein de manières, mais il y a au moins une manière que je trouve très intéressante d’un point de vue féministe, même si encore une fois c’est assez pessimiste 🙂 …
Et encore une fois, si tu tombes sur des trucs intéressants sur ce film, n’hésite pas à transférer les liens.
A bientôt, et merci encore pour toutes ces idées.
Paul RigousteParticipantOui, le sort réservé à ce personnage d’asexuel m’a aussi beaucoup énervé. J’ai l’impression qu’on est en plein dans le cliché de l’asexuel qui serait un intello frustré qui, à force d’être trop cérébral, a fini par refouler dangereusement sa « nature de mâle » (avec ses « pulsions sexuelles incontrôlables »), « nature » qui reprend le dessus parce qu’elle est « irrépressible », etc. Donc à mon avis cette scène est non seulement horrible dans la représentation qu’elle donne des asexuels, mais aussi dans le fait de mobiliser des arguments qui servent couramment à légitimer les violences sexuelles masculines (« les hommes ont des pulsions qu’ils doivent assouvir »,etc.)
Paul RigousteParticipantMerci pour toutes ces idées. J’avais pas pensé à tout ça. Et je ne me souvenais pas de tout. Effectivement je pense aussi que le film arrive assez bien à se concentrer sur l’oppression de ces femmes blanches relativement aisées en tant que femmes (vivant de surcroît en banlieue pavillonnaire), tout en rappelant qu’elles ont des privilèges en tant que blanches de classe moyenne/supérieure.
Ce que j’aime bien je crois dans ce film (je dis « je crois » car mon souvenir est assez vague, donc il faudrait que je le revoie), c’est qu’il arrive à être à la fois assez empathique vis-à-vis de ces femmes (surtout de l’héroïne) tout en encourageant un regard critique. Donc ça tombe pas trop je trouve (quoique un peu parfois) dans un « sociologisme » qui aurait regardé ces femmes de haut avec un regard un peu supérieur et méprisant (du type Chabrol dans « Les Bonnes Femmes »).
Et sur la première scène, au début j’avais un peu peur que le côté outrancièrement horrible du type joué par Grégoire Oestermann serve à dédouanner par contraste les hommes et les blanch-e-s de sexisme et de racisme (surtout qu’il me semble que cet acteur avait déjà eu cette fonction dans Intouchables, où il était dépeint comme le raciste, et par contraste le personnage de Cluzet passait pour antiraciste …). Mais là il me semble que c’est différent, car ce que cette scène pose surtout à mon avis, c’est la complicité masculine entre le patron sexiste raciste horrible et le mari de l’héroïne. Du coup, le film nous invite à le regarder avec un œil critique (il est plus « de gauche » que l’autre, certes, mais sur la question du sexisme, il a une connivence avec l’autre en tant que mec). J’ai trouvé que cette scène, malgré son côté apparemment un peu caricatural (même si ce n’est à mon avis pas si caricatural que ça), nous préparait bien à la suite : à regarder avec un œil très critique le comportement « gentiment sexiste » du mari le matin (que du coup on est invité à voir comme une oppression). Je sais pas si je suis clair.
Et pareil, j’ai trouvé très bien le passage avec la mère, qui est revenue de tout ça, et qui a une conscience de cette oppression patriarcale que la fille est en train de plus en plus réaliser. Ça paraît un peu forcé ce discours si clair et explicite, mais en même temps c’est pas mal je trouve qu’il y ait un personnage plus conscient de cette oppression, qui tient un discours cash. Ça a un peu la même fonction que l’extrait de Virginia Woolf peut-être.
13 juillet 2014 à 17 h 25 min en réponse à : Dragons 2, l'apologie du paternalisme bienveillant #9485Paul RigousteParticipantJ’ai vu le film et effectivement, quelle horreur absolue! Je ne sais pas ce qui m’a le plus horripilé entre le virilisme, le spécisme, et le culte du chef. Atroce. Et le racisme est effectivement assez grandiose. Le Viking basané qu’on-ne-peut-raisonner-parce-qu’il-ne-comprend-que-le-langage-de-la-force, il fallait le faire… surtout d’une manière aussi décomplexée. Ça fait vraiment peur…
Paul RigousteParticipantEt sinon, dans le même genre, j’avais regardé aussi un film que la réalisatrice de La Vie Domestique disait avoir beaucoup aimé : Safe, de Todd Haynes.
C’est assez ambigu comme film, et assez pessimiste, voire peut-être un peu cynique, mais je suis pas sûr. J’en dis pas plus si quelqu’un-e veut le voir. L’oppression des femmes au sein du foyer est aussi le sujet central du film (entre autres).
Paul RigousteParticipantOui, c’est vrai, j’avais oublié cette scène. Elle fait partie des moment que je trouve intéressant politiquement, mais malheureusement assez mal fait, je trouve que ça sonne un peu faux, que c’est un peu trop caricatural (je sais pas trop pourquoi).
Une autre scène qui m’intrigue un peu à ce niveau, c’est celle de l’atelier de littérature. Après que la prof a lu l’extrait de Virginia Woolf, il y a une discussion avec les élèves. A la fin, la prof s’adresse à l’une des élèves en disant « En France, les femmes sont libres de leur corps, elles sont libres d’avoir des enfants ou pas, de se marier ou pas, de travailler, de voter ». Et une des élèves (noire) lui rétorque : « ah ben on doit pas toutes vivre en France alors ». Et c’est sur cette phrase que se termine la scène.
Comment tu as compris cette scène toi? Moi je me demande si le discours est raciste (à base de : la femme blanche n’a pas conscience de l’oppression sexiste que vivent les femmes noires parce qu’elle est privilégiée par rapport à elle. Dans le sens de l’instrumentalisation raciste du féminisme qui domine aujourd’hui en France). Mais en même temps je ne crois pas, car tout le film est centré sur des femmes blanches de classe moyenne/supérieure qui vivent en banlieue pavillonnaire. Du coup, je me dis que la phrase de l’élève a peut-être pour but de mettre en évidence que la prof n’a pas une claire conscience de l’oppression sexiste qu’elle subit elle aussi en tant que femme blanche française de sa classe. Mais je sais pas trop. Comment tu l’as comprise toi cette scène ?6 juillet 2014 à 20 h 43 min en réponse à : Dragons 2, l'apologie du paternalisme bienveillant #9251Paul RigousteParticipantSnif, j’attendais avec impatience ce Dragons 2 car j’avais trouvé le 1 plutôt cool. Mais là vous me refroidissez sérieusement 🙂 . C’est dommage parce que je trouvais les réalisateurs Dean DeBlois et Chris Sanders assez intéressants jusqu’à Dragons 1 (ils avaient bossé sur Mulan et Lilo et Stitch avant aussi notamment). Mais après Chris Sanders qui passe définitivement du côté obscur avec le politiquement catastrophique The Croods, on dirait que Dean DeBlois a lui aussi sombré… Snif snif.
Et je ne lis pas encore votre lien pour ne pas me spoiler Dragons 2, mais je trouve a priori assez juste cette idée selon laquelle de plus en plus de persos féminins potentiellement intéressants sont créés … pour être finalement laissés à la marge du film (centré autour de l’homme, sa quête, ses problèmes, ses exploits, etc.). Je pense que c’est une manière de satisfaire plus de publics que dans un film 100% masculin viriliste, tout en continuant de reproduire l’ordre patriarcal : on invente un perso féminin intéressant pour que les femmes (et/ou pro-féministes) soient content-e-s, mais on laisse l’homme au premier plan pour les autres. Comme ça, libre à celleux qui ont envie de voir des femmes intéressantes de développer ces personnages pour elleux-mêmes, de leur donner plus d’importance que dans le film ou de se contenter du peu de miettes que le film daigne leur offrir. Mais attention, pas question de les développer vraiment ces personnages !, comme ça ceux qui n’aiment pas trop que les femmes prennent trop de place et préfère la bonne vieille domination masculine ne sont pas trop dérangés. Grrrrrr.
Paul RigousteParticipantTout à fait d’accord. Après, je trouve a posteriori que mon emploi du terme « fantasme » était peut-être un peu bof politiquement, parce que j’ai l’impression que ce mot connote uniquement quelque chose relevant de l’imaginaire. Or, comme l’explique très bien l’auteure de l’article, ce « fantasme » s’articule à un rapport de domination bien réel, à une violence qui est réelle et pas que symbolique. Les deux sont indissociables de toute façon, mais je trouve très bien de rappeler, comme le fait l’article, en quoi ce fantasme de domination légitime et soutien symboliquement une domination réelle, « matérielle ». Bref, très chouette article encore une fois 🙂
Paul RigousteParticipantSuper intéressant, merci! Une des scènes du film de Ferrara qu’elle raconte (celle du livreur vietnamien) m’a fait repenser à une scène absolument affligeante du film « Jusqu’à ce que la fin du monde nous sépare » (Seeking a Friend for the End of the World), qui se déroule aussi sur fond d’apocalypse. Dans la scène en question, le héros (incarné par Steve Carell) dit à sa femme de ménage (immigrée) qu’elle n’est pas obligée de venir travailler chez lui, vu que c’est la fin du monde bientôt, mais la femme ne comprend pas, et persiste à vouloir se faire exploiter par lui. Et cette scène est censée être drôle.
On est vraiment dans le fantasme du dominant que décrit l’article : d’un côté, l’homme blanc bourgeois qui peut se demander ce qu’il veut vivre avant la fin du monde (en l’occurrence, l’Amour avec une majuscule), et de l’autre, la femme immigrée non-blanche prolétaire qui NE PEUT PAS envisager autre chose que servir le maître blanc, parce que c’est dans sa nature de femme, de prolo et de non-blanche. Comme si elle était programmée à ça et tellement heureuse de se faire exploiter que c’est ça qu’elle voudrait faire jusqu’à son dernier souffle.
Paul RigousteParticipant@ Joffrey Pluscourt
Juste sur quelques points :
« Est ce que bousculer meme les egalitaristes c’est si inutile et risque de les detourner de la vraie foi? »
Ce n’est pas un film qui « bouscule les égalitaristes » ou les fait réfléchir. C’est un film qui leur crache à la figure et les méprise ouvertement. Si ce film « stimule » quelque chose (comme vous le dites plus haut), il ne stimule pour moi que les rapports d’oppression déjà en place. Le discours anti-politiquement correct n’a rien de subversif, il ne fait au contraire que réaffirmer les normes les plus nauséabondes en ridiculisant celleux qui s’y opposent, et conforte ainsi les systèmes de domination qui cimentent notre société (sexisme, racisme, etc.).
« (qu’on m’explique en quoi dogville, manderlay, les idiots. dancer in the dark… sont mysogines et ou racistes svp Paul). »
J’ai juste parlé de Breaking the Waves, Dancer in the Dark et Dogville (les seuls que j’ai vu de lui), en disant qu’ils étaient sadiques et misogynes. Et on peut rajouter Nymphomaniac à la liste d’ailleurs.
Avant même de parler des scénarios de ces films dans le détail, je trouve déjà ça sadique et misogyne parce que ces films sont à chaque fois la mise en scène par un homme d’une femme qui se fait violenter, torturée, violée, humilier, tuer, etc., et ce sans aucun discours féministe qui replacerait ces violences dans un système patriarcal, sans aucun autre recul critique sur ces violences que l’autosuffisance du Lars qui se dit « harf harf qu’est-ce que je suis intelligent et subversif ». Epurés, ces scénarios pourrait avoir pour équivalent un film où on voit un mec qui viole, tabasse, humilie, etc. une femme pendant 2 heures. Un type qui torture une femme, que ce soit en film ou dans la réalité, vous ne trouvez pas ça misogyne vous ?
Après, je pense que nous n’avons de toute façon pas du tout les mêmes présupposés et positions politiques, donc je pense que nos possibilités de nous entendre sont assez limitées 🙂 . De ce que je comprends de votre position, vous êtes typiquement dans un discours « antipolitiquement correct » (avec toutes ses variantes, dont l’antiféminisme). Ça me semble assez clair quand vous écrivez :
« Les idiots, Dogville, Manderlay et le discours de l’homme de nymphomaniac (et sans doute beaucoup d’autre films a y réfléchir) sont meme des metacritiques explicites de certains discours politiques trop éthéré, rationnalistes et vise non plus les discours dominant mais les contre discours dominants qui rajoute finalement de l’aliénation à l’aliénation. »
Pour vous, les discours qui s’opposent au discours dominant rajouteraient « de l’aliénation à l’aliénation »…. Le discours féministe serait un discours « aliénant »…. Difficile de faire plus antiféministe. Après j’imagine que vous allez me dire que c’est seulement « certains » discours féministes ou politiquement correct qui sont aliénants, mais ces discours là, personnellement, je ne les entends jamais dans la bouche des féministes, mais seulement dans la bouche des antiféministes qui caricaturent les féministes pour mieux discréditer leurs luttes pour l’égalité.
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