Répondre à: Bande de filles – Céline Sciamma

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Paul Rigouste
Participant

Oui effectivement, j’ai aussi trouvé qu’il y avait des trucs problématiques dans ce film, surtout niveau racisme. Et le passage en revue des critiques que fait Régis Dubois dans le lien que tu as mis est assez édifiant (après je pense qu’il ne faut pas non plus mettre le racisme du film sur le même plan que le racisme des critiques français, qui est à mon avis d’un autre niveau). Par contre ce qui me gonfle dans ce texte (en plus de certaines critiques qu’il fait et que je trouve infondées), c’est le ton paternaliste qu’il adopte vis-à-vis de Sciamma au début (« Mais là, franchement Céline, tu t’es ratée, ton film est bourré de maladresses, etc. »), ça fait un peu « je vais t’expliquer la vie, petite »… (le sexisme n’est pas loin à mon avis…)

Sinon j’avais aussi lu le texte « à chaud » du collectif anti-négrophobie, publié sur leur page Facebook, que j’avais trouvé intéressant (même si je suis un peu dubitatif sur certains points de leur critique aussi) :

https://fr-fr.facebook.com/BrigadeAntiNegrophobiePageOfficielle

« BANDE DE FILLES »… OU COMMENT RÉUSSIR UNE BONNE SOUPE EN RÉCHAUFFANT DE VIEUX CLICHÉS PÉCHÉS À LA SOURCE DE LA #NÉGROPHOBIE STRUCTURELLE !

Il y avait tellement de choses (positives) à dire sur les jeunes filles noires, qu’il est suspect de constater que c’est par cette fenêtre cassée que le cinéma francais s’est enfin décidé à laisser entrer dans son pré carré autant de jeunes adolescentes d’origine africaines… en même temps.

Si le film « La Squale » et son lot de préjugés avait déjà réussi à forcer la porte qui participait déjà à faire des jeunes filles noires des « sauvageons » comme les autres… « Bande de filles » l’a définitivement défoncé !

Sur fond d’un féminisme (à la ni putes ni soumises) ce film cherche vraisemblablement à nous faire croire qu’il est venu sauver d’une mort certaine des adolescentes que le Racisme d’État a seul emprisonné dans leur piètre condition « raciale » de noire.

Pour réussir ce tour de force, « Bande de filles » s’est donc sentie obligé de dénoncer un machisme implacable, forcément incarné par une horde de « sauvageons » noirs (et sous-entendus arabes) qui infesteraient les banlieues dans lesquelles la France coloniale a si gentiment parqué leurs aïeux pour les remercier de s’être battus pour qu’elle puisse jouir pleinement de sa liberté retrouvée.

Soit dit en passant, ce genre de scénario qui consiste à systématiquement transformer les victimes de l’injustice sociale et « raciale » en coupables « idéaux, donne l’impression d’inviter « silencieusement » la police à mettre en « cage » toute cette vermine… convaincu qu’au final un certain Dieu (repeint en blanc) reconnaîtra les siens !

Selon nous, ce film et son auteur cherchent désespérément à nous faire croire que pour survivre dans cette jungle – boudée par le soleil d’une « démocratie » cachée par l’obscurantiste dictat de leurs frères – ces jeunes filles seraient obligé de faire taire à jamais leur part de féminité pour devenir définitivement des mâles dominants comme « les autres ».

Car dans les cités malfamés le reniement de soi serait apparemment le prix fort à payer pour avoir ne serait-ce qu’une infime chance de s’intégrer. Ce qui, voudrait-on nous faire croire, différerait fondamentalement des conditions d’intégration « officieusement » imposées aux « minorités visibles » par une société française qui se rêve toujours blanche et s’affirme plus égalitaire que l’égalité elle-même.

En d’autres termes (et même si ce n’est pas exprimé aussi clairement) c’est avant tout d’un problème de « sauvageons » (d’origine) immigrés dont il serait question… et non d’un problème de société susceptible d’être « foncièrement » injuste et raciste !

Aveuglé.e par ce prisme racoleur, nul.le n’a idée de la démesure du cadeau empoisonné que le cinéma francais (raciste) a généreusement fait à ces jeunes filles noires. L’air de rien, ce « présent » à l’arrière goût de discrimination – censée être positive – donnera à coup sûr du grain à moudre à l’extrême droite… mais aussi à la droite traditionnellement admise, sans oublier la gauche qui – en ces temps de crise – nous dévoile bien malgré elle son vrai visage… en épousant toujours un peu plus ouvertement les thèses racistes qu’elle prêtait, il n’y pas si longtemps, au Front National.

Mais quand on y regarde de plus prêt, ce film fonctionne un peu comme un mode d’emploi. Car s’il existe bien des petites bandes de jeunes filles noires ici et là (comme il existe d’ailleurs des petites bandes de filles blanches… apparemment plus acceptables)… attendez vous à une recrudescence de ce phénomène social qui sera de plus en plus observé sous l’angle « racial ».

Pour cause, il y a fort à parier que – comme à l’époque du film « Warriors » – ces bandes au féminin se propageront comme une traînée de poudre à travers les grandes villes françaises. Surtout qu’à cause de l’effet miroir qu’il suscite (in)volontairement, ce film offre enfin à toutes celles que la société française ne permettait pas d’exister « officiellement » – parce que noire – une visibilité… pour le moins empoisonnée.

Pour qu’il en soit ainsi, ce message de propagande qui n’avoue pas son nom a su « fiché » en haut de l’affiche, justement, une brochette de filles au teint « ébène », sans jamais préciser qu’il était finalement question d’une juxtaposition de portraits dignes de ceux que restituent les avis de recherches épinglés sur les blancs tableaux des commissariats de police.

Résultats des courses :

grâce à ce biopique (soi-disant féministe), les bandes de filles (noires) auront désormais de grandes chances d’être enfin traités sur le même pied d’égalité que leur frères… en matière de contrôles aux faciès, notamment, et autres humiliations institutionnelles du même genre.

Parce que « Bande de filles » a exaucé leur silencieux voeux de « parité »… ces « voyelles » vont enfin devenir des « voyous » comme les autres. Ce qui permettra notamment aux forces d’un ordre injuste et foncièrement raciste de les traiter et surtout les loger à la même enseigne que leurs frères systématiquement présumés coupables. Ainsi ce discours de propagande justifiera que l’on plaque chaque membre de ces « bandes de filles » (noires) contre les murs avant de les palper comme leurs homologues masculins et/ou de les canarder à coup de flash ball, de taser ou autres armes autrement plus létales. Tout cela, bien sûr, sans que la « majorité invisible » – contaminée par ce genre de préjugés – ne s’en émeuve.

Autant dire qu’après le film « Case Départ » qui a abordé le gravissime sujet de l’esclavage avec un humour suspect qui semble s’être amusé à passer par dessus la jambe la responsabilité du dit « pays des droits de l’homme » en la matière… le cinéma francais prouve une fois de plus qu’il a un sérieux problème avec une « question noire » que nous avons tout intérêt à imposer selon nos propres critères.

Voici donc notre première impression – à chaud – concernant la lecture entre les lignes du film « Bande de filles ». Cependant il va nous falloir beaucoup, beaucoup… beaucoup plus de recul pour pouvoir analyser ce concentré de clichés (négrophobes) venus réduire une fois encore la fille noire à un vieux fantasme colonial (blanc) qui l’accuse toujours d’être à l’image de ses moeurs supposés légères et forcément héritées de sa prétendue sauvagerie naturelle.

Ah… on avait oublié de vous dire – qu’une fois n’est pas coutume – dans ce film la fille noire a vocation à danser (de manière diabolique-ment sexy)… mais elle ne semble pas encore habilitée à penser !

Ainsi chacun.e de nous se reconnaîtra, et l’ordre raciste subtilement imposé par ce monde teinté d’un universaliste à l’occidental sera aussi bien gardé que les moutons que l’école et la télévision nous conditionnent à être.

Pour finir, nous pensons qu’à l’instar du dernier livre de Mr Zemmour, il n’est pas exclu que ce film rencontre un franc succès en même temps qu’un public des plus enthousiaste.

Mais la vraie question reste maintenant de savoir si c’est parce que « Bande de filles » pose un vrai problème de société… en quête de vraies réponses ?

Ou est-ce tout simplement parce qu’en ses temps de crise qui décomplexent les actes et les paroles racistes, ce film raconte finalement ce que la « majorité invisible » a besoin d’entendre et de voir… pour pouvoir se déculpabiliser de nourrir une pensée raciste – qui en période de plein emploi – serait étiquetée comme étant parfaitement inacceptable ?

Bref… tout cela pour dire qu’on est pas sorti de l’auberge secrètement tenue par un Racisme d’État qui se révèle de plus en plus invisible.

La négrophobie est une arme (néo)coloniale d’aliénation et de destruction massive qui n’avoue pas son nom.

COLLECTIF ANTI NÉGROPHOBIE

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