Bande de filles – Céline Sciamma

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  • Ce sujet contient 27 réponses, 1 ps. et a été mis à jour pour la dernière fois par Arroway, le Il y a 10 années.
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  • #7333 Répondre
    Arroway
    Invité

    Un film potentiellement intéressant à venir, présenté à Cannes en ouverture de la quinzaine des réalisateurs ; par la réalisatrice de Tomboy.

    Interview : http://m-e-u-f-s.tumblr.com/post/85899981042

    #7366 Répondre
    Paul Rigouste
    Participant

    C’est marrant cette interview, parce que j’ai l’impression qu’il y a un côté dépolitisant dans son discours (avec des expressions type « territoire déambulatoire de cinéma », « la marge », « la périphérie », etc.). Je me dis que c’est peut-être lié à son statut de réalisatrice à tendance féministe dans un cinéma français dominé par les hommes (une sorte de manière de se protéger pour garder sa place). Je trouve que son vocabulaire fait très « cahiers du cinéma » (abstractions et esthétisme).

    Un passage qui m’a intrigué aussi c’est quand elle dit un truc comme « c’est vrai qu’on aurait tendance à se demander « quelle légitimité j’ai moi en tant que femme blanche à filmer des femmes noires », mais j’ai décidé de pas me poser de questions, parce qu’il faut pas avoir peur ». J’ai l’impression que ce genre de discours brosse dans le sens du poil l’idéologie dominante en France (dépolitisante, voire « anti-politiquement correct »).

    Après le film sera peut-être très cool (et sûrement beaucoup plus cool que la majorité de la production raciste et sexiste habituelle, tant dans le ciné populaire que le ciné d’auteur), mais bon, je trouve cette espèce de réticence à aborder les questions politiques de manière un peu directe assez symptomatique…

    Il faudrait voir ce qu’elle dit par ailleurs (j’ai l’impression par exemple qu’il y a de plus en plus une réticence à employer le mot « féminisme » de sa part, pour ce film notamment, alors qu’elle le faisait pour Naissance des pieuvres, son premier film. Mais il faudrait regarder les autres interviews auxquelles elle a répondue pour être sûr).

    #7367 Répondre
    Lau
    Invité

    J’aime beaucoup cette réalisatrice mais effectivement, je rejoins Paul pour dire qu’elle a tendance à constamment dépolitiser ce qu’elle fait. Dans des interviews pour Tomboy, elle a dit à plusieurs reprise qu’elle ne voulait pas aborder la question du genre parce qu’en fait son sujet c’est une dynamique transitoire blablabla abstraction esthétique.
    D’ailleurs si tu as des liens d’interviews où elle évoque frontalement le féminisme (pour son premier film) ça m’intéresse.

    #7368 Répondre
    Paul Rigouste
    Participant

    Là par exemple elle dit que Naissance des pieuvres est pour elle un film « féministe » (http://womenandhollywood.com/2008/05/16/interview-with-celine-sciamma-director-of-water-lillies/), dans la réponse à la dernière question. C’est vite fait mais c’est déjà ça. Alors que dans l’interview sur Bande de filles, elle parle exclusivement du « féminin », alors qu’on lui pose une question sur la « guerre des sexes » (sic…). Avec des formules du genre « le féminin est subversif »… (Après le fait que l’interview soit pour un blog américain est peut-être important aussi, la presse états-unienne n’étant pas la presse française…).

    Sinon ça me fait penser à un truc qu’avait dit Geneviève Sellier (qui a étudié les réalisatrices dans le cinéma français d’aujourd’hui) à un débat autour du film Polisse de Maïwenn : le fait que les réalisatrices font des films plus explicitement féministes quand elles débutent (et le qualifient aussi sûrement plus facilement de féministe), et après la pression patriarcale qui pèse dans le milieu du cinéma français fait que leur discours et leurs films se dépolitisent plus ou moins, parfois jusqu’à des horreurs sexistes (comme le Polisse de Maïwenn, alors qu’apparemment son premier film, « Pardonnez-moi », s’attaque de manière assez frontale et directe au patriarcat, en la figure de son père qui a abusé d’elle quand elle était petite il me semble (mais je dis peut-être des bêtises, mon souvenir est vague, mais il me semble que c’est ça)).

    A propos de cette attitude de « repli » ou de « défense » des réalisatrices françaises, on peut trouver ça lâche ou pas individuellement, mais l’important j’ai l’impression c’est que ça montre bien comment la domination des hommes blancs dans ce milieu a des conséquences sur les représentations véhiculées par les films, et la difficulté pour des femmes (en particulier féministes) de faire entendre leur voix sans compromis.

    #7418 Répondre
    Arroway
    Invité

    Le passage qui m’a le plus choquée c’est quand elle dit que filmer un groupe de filles exclusivement noires était aussi un « parti pris esthétique » (ou une expression du genre).
    Mais c’est marrant parce qu’elle dit ça après avoir dit qu’on ne trouve quasiment pas de productions comme ça, à demi-mots on comprend quand même qu’elle tacle certains stéréotypes du cinéma, mais comme vous dites pas de manière frontale.

    Dans le même genre, ça me rappelle une interview de Camille Chamoux pour Telerama au sujet du film Les Gazelles :

    Première question (ou deuxième): est-ce que le film est féministe ?
    La réponse est très, très précautionneuse… (oui et non, oui malgré nous, etc).

    #7476 Répondre
    Paul Rigouste
    Participant

    Ah oui effectivement, c’est marrant cette manière de présenter le film comme « féministe malgré lui »… On sent bien que y a une peur du qualificatif de « féministe » quand elle dit qu’il n’y avait aucune volonté de « lutte, de revendication ou de brûlot » avec un ton qui mime un discours un peu « agressif ». Comme s’il fallait surtout pas être trop menaçantes pour les hommes, pas trop les bousculer. Juste un peu mais pas trop. Après j’avais pas entendu parler de ce film, et ça a l’air plutôt cool, et elle dit plein de truc cool par ailleurs.

    Un documentaire qui doit être intéressant à voir sur ce sujet c’est « Cinéast(e)s », réalisé par Julie Gayet, qui interviewe plein de réalisatrices françaises sur leur place dans le monde du cinéma avec un axe qui a l’air un peu potentiellement féministe. Ça doit être intéressant de voir ce que les réalisatrices disent, et aussi ce qu’elles ne disent pas…

    Ici y a une sorte de « bonus » : http://www.canalplus.fr/c-series/c-borgia/pid5478-news.html?news=953083. Et y a d’ailleurs Céline Sciamma qui parle à la fin, et qui refuse de poser la question du « regard féminin » ou de la spécificité de la position des femmes, en ramenant cette question à la question du « regard d’auteur ». Y a comme un refus de s’interroger sur la différence entre femmes et hommes derrière la caméra, avec en plus un déplacement vers une différence cinéma commercial/cinéma d’auteur (beaucoup plus en phase avec les catégories de pensée des critiques français type Cahiers du cinéma). Et elle n’est pas la seule à faire ça d’ailleurs dans cet extrait.

    Si jamais quelqu’un-e arrive à trouver un lien vers ce documentaire ça m’intéresse.

    #7477 Répondre
    Arroway
    Invité

    Perso, je comprend cette réticense à parler d’un cinéma spécifiquement féminin ou masculin parce qu’on peut très vite retomber dans quelque chose d’essentialiste. On a la même chose en science lorsqu’on s’interroge sur la science est masculine, si les femmes font la science de manière différente des hommes, etc. C’est glissant comme terrain.

    #7478 Répondre
    Arroway
    Invité
    #7480 Répondre
    Paul Rigouste
    Participant

    Oui je suis d’accord sur le risque essentialiste de cette question du « regard féminin », mais là en l’occurrence, c’est pas à ça que Sciamma s’oppose (du moins pas dans cet extrait, après il faudrait voir le documentaire entier).

    Parce que sinon cette question peut avoir son intérêt j’ai l’impression, si on insiste bien sur le fait que ce « regard féminin » est le produit de la construction sociale différentiée des identités sexuées sous le patriarcat. Parce que je me dis que ça rejoint l’idée de « privilège épistémologique » des femmes quand il s’agit d’étudier l’oppression qu’elle subissent. Là c’est pareil j’ai l’impression, il y a un privilège épistémologique des femmes lorsqu’il est question de représenter des femmes au cinéma. Non?

    #7481 Répondre
    Arroway
    Invité

    Comme je comprend l’extrait : le thème tourne autour de savoir si les femmes ont autant accès que les hommes aux productions à gros budget. Dans sa première intervention, Sciamma dit qu’on ne pose pas la question à la réalisattrice de Bowling si elle fait un cinéma féminin, parce qu’elle est à la tête d’un gros budget, d’un gros projet, dans une position de réel pouvoir.
    Sa deuxième intervention est directement en lien :
    « Donc le clivage, cette question du regard féminin, de cette sensibilité, elle se pose à l’endroit du regard d’auteur en fait (avec un sourire en grimace, donc je pense qu’elle est ironique ici), pas la question d’un regard féminin, enfin d’une femme aux commandes d’un film. Parce que sur la question économique, c’est saillant. Regardons le budget qu’ont les femmes, regardons le budget qu’ont les hommes… »
    Donc je comprend sa phrase comme : en fait, quand une femme fait un film à gros budget et à une position de pouvoir, il ne vient à personne l’idée de parler de cinéma féminin. Par contre quand il s’agit d’un film à petit budget i.e. film d’auteur, alors là tout de suite on pose la question d’un prétendu regard féminin.
    C’est pas bête du tout, ça met en lien la perception d’un « regard féminin » avec le pouvoir ou l’ambition de la réalisatrice qui fait un gros film ou pas.

    Le « privilège épistémologique » n’est pertinent à mon avis que dans le cas d’un cinéma féministe, qui dénoncent des oppressions. Sinon, je ne vois pas ce que cela donne comme avantage au sein d’un cinéma prétendumment « féminin », qui n’a pas pour vocation de dénoncer quoi que ce soit. On peut être une femme réalisatrice, filmer des actrices, prendre le point de vue d’une héroïne féminine et in fine faire un film avec un scénario qui reproduit des valeurs patriarcales.

    #7575 Répondre
    Paul Rigouste
    Participant

    Oui, effectivement, c’est peut-être vrai ce qu’elle dit sur la différence entre cinéma d’auteur et cinéma commercial, mais j’ai l’impression que c’est une autre question, et que du coup là elle détourne la question (voire même elle l’ignore) parce qu’elle a pas envie de répondre à la question du « regard féminin » (question qui, encore une fois, peut à mon avis être reformulée en termes féministes si on a envie de le faire, ce qui n’est visiblement pas le cas de Sciamma…).

    Je trouve assez révélatrice sa manière d’éviter la question. Je re-cite bien le passage clef : « Donc le clivage… cette question du regard féminin, de cette sensibilité… elle se pose à l’endroit du regard d’auteur en fait. Donc c’est la question du regard d’auteur, pas la question du regard féminin ».

    Là pour moi y a un sophisme. C’est pas parce que cette question « se pose à l’endroit du cinéma d’auteur » que « c’est la question du regard d’auteur ». Y a un glissement ici qui lui permet ensuite de ne pas répondre à la question du « regard féminin » (après elle le fait ptet par ailleurs dans le docu, je sais pas).

    Ça me fait penser à une réponse qu’elle avait faite à cette question du regard féminin dans l’horrible numéro 681 de septembre 2012 des Cahiers du cinéma intitulé « Où sont les femmes ? ». Elle fait exactement la même chose : elle évite la question en évoquant la dichotomie cinéma d’auteur/cinéma commercial, puis en parlant de « la jeunesse » et des « nouvelles générations ».

    Et en plus, je la trouve un peu ambiguë sur cette opposition cinéma d’auteur/commercial, car personnellement je comprends pas bien si elle critique l’idéologie auteuriste type Cahiers du cinéma (à base de « les films d’auteurs véhiculent une vision du monde, un regard singulier qui est celui de leur créateur, alors que les films commerciaux sont juste des machines consensuelles destinées à faire du fric (sauf quand un auteur génial réussi à y imprimer sa marque personnelle…)) ou si elle la reconduit juste. A mon avis, elle ne la questionne pas vraiment.

    Après je veux pas charger spécialement Sciamma, parce que j’aime beaucoup ses films et que c’est une des réalisatrices les plus intéressantes politiquement à l’heure actuelle en France. Mais bon je pense qu’elle a un discours assez obscur, qui tient sûrement au fait que pour pouvoir avoir la place qu’elle a actuellement dans le cinéma français, elle a pas trop intérêt à y aller trop cash dans le discours féministe (je sais pas si c’est conscient ou pas chez elle, mais c’est pas tellement important de toute façon, le résultat est le même : il est difficile/mal venu de parler trop politiquement du cinéma en France, et surtout d’en parler d’un point de vue féministe quand on est une réalisatrice).

    Et après je suis d’accord sur le fait qu’un cinéma « féminin » ça sert pas à grand-chose si ça se borne à reproduire la même sauce patriarcale. Mais je suis pas sûr qu’il y ait forcément besoin de « dénoncer » comme tu dis. Il ressort par exemple d’études sur le sujet que dans les films tournés par des réalisatrices, il y a globalement plus de femmes en général, et surtout plus de diversité dans les rôles féminins (par exemple au niveau de l’âge ou du physique des actrices, ou encore dans les personnages incarnés, moins stéréotypés). Sciamma est un bon exemple : Naissance des pieuvres, Tomboy, Bande de filles. C’est pas exactement les mêmes types de rôles féminins que dans les films de Ozon ou de Desplechin par exemple. (Je dis pas que c’est automatique, que des femmes déconstruisent forcément les stéréotypes, mais en moyenne y a quand même cette tendance qui laisse penser que les femmes n’ont peut-être pas le même regard sur la société (et en particulier sur les femmes) que les hommes, qu’elle ne regardent pas exactement au même endroit et de la même manière, et ce malgré les contraintes patriarcales qui pèsent sur elles dans le milieu, comme je l’ai dit.

    #7578 Répondre
    Arroway
    Invité

    OK, je vois ce que tu veux dire. J’ai pas trop lu ou regardé d’autres interviews de Sciamma, mais de ce que tu en dis ça a l’air effectivement cohérent avec son discours en général.

    #22504 Répondre
    Grussie
    Invité

    J’ai été le voir et j’ai trouvé que ça se sentait que la réalisatrice était une femme blanche privilégiée socialement. J’avais commencé à écrire que je trouvais que le sexisme était plutôt bien traité, mais que pour le racisme, même en étant blanche et en n’ayant pas des masses de culture et de réflexion anti-raciste, j’ai ressenti un malaise pendant tout le film. Mais en fait, je me demande si le sexisme qui est montré, dans la manière dont il est représenté, ne renforce pas plutôt le racisme, en mode « ohlàlà mais ils sont horriblement sexistes ces mecs de banlieue ».
    En fait le film illustre pas mal de clichés, au lieu de les démonter comme je m’y attendais naïvement.
    Cet article en parle : http://lesensdesimages.com/2014/10/23/bande-de-filles-safari-sur-la-croisette/

    #22516 Répondre
    Paul Rigouste
    Participant

    Oui effectivement, j’ai aussi trouvé qu’il y avait des trucs problématiques dans ce film, surtout niveau racisme. Et le passage en revue des critiques que fait Régis Dubois dans le lien que tu as mis est assez édifiant (après je pense qu’il ne faut pas non plus mettre le racisme du film sur le même plan que le racisme des critiques français, qui est à mon avis d’un autre niveau). Par contre ce qui me gonfle dans ce texte (en plus de certaines critiques qu’il fait et que je trouve infondées), c’est le ton paternaliste qu’il adopte vis-à-vis de Sciamma au début (« Mais là, franchement Céline, tu t’es ratée, ton film est bourré de maladresses, etc. »), ça fait un peu « je vais t’expliquer la vie, petite »… (le sexisme n’est pas loin à mon avis…)

    Sinon j’avais aussi lu le texte « à chaud » du collectif anti-négrophobie, publié sur leur page Facebook, que j’avais trouvé intéressant (même si je suis un peu dubitatif sur certains points de leur critique aussi) :

    https://fr-fr.facebook.com/BrigadeAntiNegrophobiePageOfficielle

    « BANDE DE FILLES »… OU COMMENT RÉUSSIR UNE BONNE SOUPE EN RÉCHAUFFANT DE VIEUX CLICHÉS PÉCHÉS À LA SOURCE DE LA #NÉGROPHOBIE STRUCTURELLE !

    Il y avait tellement de choses (positives) à dire sur les jeunes filles noires, qu’il est suspect de constater que c’est par cette fenêtre cassée que le cinéma francais s’est enfin décidé à laisser entrer dans son pré carré autant de jeunes adolescentes d’origine africaines… en même temps.

    Si le film « La Squale » et son lot de préjugés avait déjà réussi à forcer la porte qui participait déjà à faire des jeunes filles noires des « sauvageons » comme les autres… « Bande de filles » l’a définitivement défoncé !

    Sur fond d’un féminisme (à la ni putes ni soumises) ce film cherche vraisemblablement à nous faire croire qu’il est venu sauver d’une mort certaine des adolescentes que le Racisme d’État a seul emprisonné dans leur piètre condition « raciale » de noire.

    Pour réussir ce tour de force, « Bande de filles » s’est donc sentie obligé de dénoncer un machisme implacable, forcément incarné par une horde de « sauvageons » noirs (et sous-entendus arabes) qui infesteraient les banlieues dans lesquelles la France coloniale a si gentiment parqué leurs aïeux pour les remercier de s’être battus pour qu’elle puisse jouir pleinement de sa liberté retrouvée.

    Soit dit en passant, ce genre de scénario qui consiste à systématiquement transformer les victimes de l’injustice sociale et « raciale » en coupables « idéaux, donne l’impression d’inviter « silencieusement » la police à mettre en « cage » toute cette vermine… convaincu qu’au final un certain Dieu (repeint en blanc) reconnaîtra les siens !

    Selon nous, ce film et son auteur cherchent désespérément à nous faire croire que pour survivre dans cette jungle – boudée par le soleil d’une « démocratie » cachée par l’obscurantiste dictat de leurs frères – ces jeunes filles seraient obligé de faire taire à jamais leur part de féminité pour devenir définitivement des mâles dominants comme « les autres ».

    Car dans les cités malfamés le reniement de soi serait apparemment le prix fort à payer pour avoir ne serait-ce qu’une infime chance de s’intégrer. Ce qui, voudrait-on nous faire croire, différerait fondamentalement des conditions d’intégration « officieusement » imposées aux « minorités visibles » par une société française qui se rêve toujours blanche et s’affirme plus égalitaire que l’égalité elle-même.

    En d’autres termes (et même si ce n’est pas exprimé aussi clairement) c’est avant tout d’un problème de « sauvageons » (d’origine) immigrés dont il serait question… et non d’un problème de société susceptible d’être « foncièrement » injuste et raciste !

    Aveuglé.e par ce prisme racoleur, nul.le n’a idée de la démesure du cadeau empoisonné que le cinéma francais (raciste) a généreusement fait à ces jeunes filles noires. L’air de rien, ce « présent » à l’arrière goût de discrimination – censée être positive – donnera à coup sûr du grain à moudre à l’extrême droite… mais aussi à la droite traditionnellement admise, sans oublier la gauche qui – en ces temps de crise – nous dévoile bien malgré elle son vrai visage… en épousant toujours un peu plus ouvertement les thèses racistes qu’elle prêtait, il n’y pas si longtemps, au Front National.

    Mais quand on y regarde de plus prêt, ce film fonctionne un peu comme un mode d’emploi. Car s’il existe bien des petites bandes de jeunes filles noires ici et là (comme il existe d’ailleurs des petites bandes de filles blanches… apparemment plus acceptables)… attendez vous à une recrudescence de ce phénomène social qui sera de plus en plus observé sous l’angle « racial ».

    Pour cause, il y a fort à parier que – comme à l’époque du film « Warriors » – ces bandes au féminin se propageront comme une traînée de poudre à travers les grandes villes françaises. Surtout qu’à cause de l’effet miroir qu’il suscite (in)volontairement, ce film offre enfin à toutes celles que la société française ne permettait pas d’exister « officiellement » – parce que noire – une visibilité… pour le moins empoisonnée.

    Pour qu’il en soit ainsi, ce message de propagande qui n’avoue pas son nom a su « fiché » en haut de l’affiche, justement, une brochette de filles au teint « ébène », sans jamais préciser qu’il était finalement question d’une juxtaposition de portraits dignes de ceux que restituent les avis de recherches épinglés sur les blancs tableaux des commissariats de police.

    Résultats des courses :

    grâce à ce biopique (soi-disant féministe), les bandes de filles (noires) auront désormais de grandes chances d’être enfin traités sur le même pied d’égalité que leur frères… en matière de contrôles aux faciès, notamment, et autres humiliations institutionnelles du même genre.

    Parce que « Bande de filles » a exaucé leur silencieux voeux de « parité »… ces « voyelles » vont enfin devenir des « voyous » comme les autres. Ce qui permettra notamment aux forces d’un ordre injuste et foncièrement raciste de les traiter et surtout les loger à la même enseigne que leurs frères systématiquement présumés coupables. Ainsi ce discours de propagande justifiera que l’on plaque chaque membre de ces « bandes de filles » (noires) contre les murs avant de les palper comme leurs homologues masculins et/ou de les canarder à coup de flash ball, de taser ou autres armes autrement plus létales. Tout cela, bien sûr, sans que la « majorité invisible » – contaminée par ce genre de préjugés – ne s’en émeuve.

    Autant dire qu’après le film « Case Départ » qui a abordé le gravissime sujet de l’esclavage avec un humour suspect qui semble s’être amusé à passer par dessus la jambe la responsabilité du dit « pays des droits de l’homme » en la matière… le cinéma francais prouve une fois de plus qu’il a un sérieux problème avec une « question noire » que nous avons tout intérêt à imposer selon nos propres critères.

    Voici donc notre première impression – à chaud – concernant la lecture entre les lignes du film « Bande de filles ». Cependant il va nous falloir beaucoup, beaucoup… beaucoup plus de recul pour pouvoir analyser ce concentré de clichés (négrophobes) venus réduire une fois encore la fille noire à un vieux fantasme colonial (blanc) qui l’accuse toujours d’être à l’image de ses moeurs supposés légères et forcément héritées de sa prétendue sauvagerie naturelle.

    Ah… on avait oublié de vous dire – qu’une fois n’est pas coutume – dans ce film la fille noire a vocation à danser (de manière diabolique-ment sexy)… mais elle ne semble pas encore habilitée à penser !

    Ainsi chacun.e de nous se reconnaîtra, et l’ordre raciste subtilement imposé par ce monde teinté d’un universaliste à l’occidental sera aussi bien gardé que les moutons que l’école et la télévision nous conditionnent à être.

    Pour finir, nous pensons qu’à l’instar du dernier livre de Mr Zemmour, il n’est pas exclu que ce film rencontre un franc succès en même temps qu’un public des plus enthousiaste.

    Mais la vraie question reste maintenant de savoir si c’est parce que « Bande de filles » pose un vrai problème de société… en quête de vraies réponses ?

    Ou est-ce tout simplement parce qu’en ses temps de crise qui décomplexent les actes et les paroles racistes, ce film raconte finalement ce que la « majorité invisible » a besoin d’entendre et de voir… pour pouvoir se déculpabiliser de nourrir une pensée raciste – qui en période de plein emploi – serait étiquetée comme étant parfaitement inacceptable ?

    Bref… tout cela pour dire qu’on est pas sorti de l’auberge secrètement tenue par un Racisme d’État qui se révèle de plus en plus invisible.

    La négrophobie est une arme (néo)coloniale d’aliénation et de destruction massive qui n’avoue pas son nom.

    COLLECTIF ANTI NÉGROPHOBIE

    #22518 Répondre
    Paul Rigouste
    Participant

    Sur la négrophobie du film, il y a aussi cette critique d’une membre du PIR : http://indigenes-republique.fr/59061/

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